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26 octobre 2015 1 26 /10 /octobre /2015 19:01

La première bataille de Polotzk. La vie au camp.

De Witebsk à Dvinsk et Riga, la Duna coule assez régulièrement au nord-ouest, dans un pays peu accidenté, parfois marécageux, et généralement boisé. Elle y reçoit quelques affluents, en particulier la Polota à droite, à mi-chemin de Witebsk à Dvinsk. Là se trouve la ville de Polotzk, qui compte aujourd’hui plus de vingt mille habitants, mais qui était, il y a un siècle, une pauvre bourgade aux maisons de bois, abritant trois milliers d’âmes environ. Le seul édifice de pierre était un grand collège de Jésuites, car la population y était en majorité catholique.

La ville est bâtie en amphithéâtre dans l’angle formé par la jonction des deux cours d’eau, qui la couvrent de trois côtés. Avant de se jeter dans la Duna, la Polona coule dans un ravin aux bords passablement escarpés. Du côté de l’est, où s’ouvre le quadrilatère, la ville était défendue par une enceinte fortifiée avec remparts et tours. Bien que dominée au nord-ouest par une forêt étendue, la position de Polotzk facilite une vigoureuse défense et fournit une très bonne base d’opérations. À travers la Duna et la Polota, plusieurs ponts assuraient les communications. Enfin le vieux Polotzk, sorte de faubourg situé sur la rive gauche de la Duna, formait une solide tête de pont.

Vers les premiers jours du mois d’août, le 2e corps d’armée était déjà réduit de 44'000 à 21'000 hommes, moins par les combats que par les maladies et les privations. Le maréchal Oudinot, se sentant trop faible pour rien entreprendre seul, s’occupait d’établir ses troupes le mieux possible autour de la ville.

Sous cette latitude et à cette époque de l’année, les jours sont encore très longs. Aussi la chaleur, une chaleur humide et lourde, était-elle accablante, au point que le maréchal lui-même déclarait n’en avoir jamais autant souffert, même en Italie. Ses officiers, qui le chérissaient, allaient pendant la nuit couper des branches dans les bois voisins, pour faire un dais de verdure sur sa tente.

Afin de renforcer Oudinot, qu’il pressait de marcher en avant, l’Empereur lui envoya le 6e corps d’armée, commandé par Gouvion Saint-Cyr, et composé principalement de deux divisions bavarois. Mais ces troupes avaient tant souffert que, sans avoir encore vu le feu, leur effectif était réduit de moitié, soit à environ 13'000 hommes. C’était un renfort appréciable. Mais c’étaient aussi de nouveaux convives autour d’une table où régnait la disette depuis plusieurs semaines. Le pain et le sel manquaient presque entièrement. L’eau potable était rare. On se procurait des animaux de boucherie et du grain dans la contrée d’alentour par réquisitions forcées. Ce mode de ravitaillement était non seulement plein de périls, car il fallut étendre de plus en plus le rayon des expéditions, mais celles-ci tournaient souvent au pillage pur et simple.

Un brin de petites histoires dans la grande Histoire. [3]

Quand ses troupes se furent un peu refaites, Oudinot marcha aux Russes. Campés à quelques lieues vers le nord, ils n’acceptèrent pas le combat, et le maréchal ne crut pas pouvoir les attaquer dans leurs lignes. Il se replia donc bientôt sur Polotzk, après quelques escarmouches. Derrière lui, les Russes s’ébranlèrent et le poursuivirent avec vigueur jusqu’aux abords de la Polona, où ils furent pourtant contenus.

Le maréchal réunit alors son conseil de guerre. Son avis, qui était d’opérer une retraite plus complète derrière la Duna, prévalut. On défendrait pourtant la ville jusqu’au bout.

Pour exécuter ce plan, une partie de l’armée passa les ponts de la Duna et s’établit sur les éminences de la rive gauche, tandis qu’une autre – c’étaient les Bavarois surtout – tenait les Russes en respect sur la Polona, en avant du pont. C’est là que le maréchal fut blessé d’un biscaïen* à l’épaule.

*Nom masculin. Fusil de rempart de gros calibre, à longue portée. Par métonymie. Projectile de ce fusil. Par extension, balle de fonte ou de fer, de la grosseur d’un petit œuf, qui entrait ordinairement dans la charge à mitraille.

Il dut remettre le commandement en chef au général Gouvion Saint-Cyr.

Plus confiant ou plus hardi que le maréchal, Gouvion prit d’énergiques dispositions pour rétablir la situation à l’avantage des Français. Il fit repasser la Duna aux troupes qui avaient commencé leur mouvement de retraite ; et par le ravin de la Polota, il les concentra à couvert sur les bords de cette rivière, à la faveur de la nuit. Puis il les laissa se reposer, sans les démasquer, jusqu’à la fin de l’après-midi. C’était le 18 août.

Pendant ce temps, plusieurs régiments de cavalerie, ainsi que tout le train d’armée, simulaient une retraite par deux routes différentes. Ces troupes se mouvaient dans d’épais tourbillons de poussière, qui en dérobaient la vue exacte, et les Russes, ainsi habillement trompés, croyaient voir s’éloigner tout le gros de l’armée française.

Ces dispositions prises, Gouvion Saint-Cyr ouvrit les feux à 5 heures par une canonnade intense. Aussitôt ses colonnes d’infanterie, sortant du ravin, marchent d’un rapide élan sur la clef des positions russes, autour du village de Spass, au nord de la Polona. À droite étaient deux divisions bavaroises, à gauche deux divisions françaises, en tout 25'000 hommes, soutenus par une forte artillerie. La division Merle, et par conséquent les Suisses, restaient en réserve et couvraient la ville.

Devant la brusque attaque des colonnes françaises, surpris, les Russes reculèrent bientôt en hâte, abandonnant canons et blessés. Puis peu à peu ils se reprirent et firent tête vaillamment. Alors commença une furieuse mêlée à l’arme blanche. « La baïonnette est un brave » avait coutume de dire le vieux Souworoff (Souvarov) ; et les Russes s’en souvenaient. Cependant ils finirent par plier sous la charge irrésistible de leurs adversaires, à la tête desquels fut mortellement blessé le vieux général bavarois Deroy, âgé de soixante-dix ans. Mais les Russes étaient enfoncés, et leur retraite, dans le soir tombant, s’accélérait de toutes parts.

La victoire des Français semblait assurée, quand se produisit un incident qui aurait pu changer la face de cette journée et en compromettre les résultats.

A suivre...

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