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14 septembre 2016 3 14 /09 /septembre /2016 17:07
La Venoge

La Venoge

Au premier plan, les casernes et la place d'exercices de l'artillerie.

Au premier plan, les casernes et la place d'exercices de l'artillerie.

Il y a 66 ans [7]
Il y a 66 ans [7]

Les élèves apprenaient…

La pesée du lait

L’horloge de l’école vient de sonner six heures. Dans le soir tombant, Pierre Crausaz, le peseur, se dirige vers la laiterie. C’est un petit bâtiment sans apparence, au milieu du village.

Il pousse la porte, tourne le commutateur. Une impression de fraîcheur humide : des instruments d’un blanc d’argent baignent dans un bassin plein d’eau. Une demi-douzaine de boilles métalliques sont rangées contre le mur. La cuve à lait est suspendue sous le tamis de laiton, à côté de la balance automatique. Sur un petit pupitre, un registre est ouvert.

Bruit de socques au dehors. C’est Gottlieb, le domestique du syndic, qui arrive en fumant sa pipe, les bras croisés, courbé sous sa charge de lait tiède.

.

- Salut.

.

Gottlieb s’approche de la cuve, verse le lait sur le tamis. Un moucheron reste pris dans les mailles de laiton. L’aiguille de la balance se déplace avec régularité, puis s’immobilise.

.

- Vingt-six trois, dit le peseur.

Il inscrit le chiffre dans le registre et dans un carnet que lui tend Gottlieb, puis il fait basculer la cuve au-dessus d’une boille qu’il vient d’avancer.

Les paysans arrivent l’un après l’autre, ou bien deux à la fois. Ils livrent leur lait, échangent quelques paroles ; le coulage est l’une des occasions que l’on a de se rencontrer, d’apprendre les dernières nouvelles du village.

Il vient aussi quelques acheteuses : l’épicière, la servante de la cure, la « dame » du régent ; et une vieille demoiselle que tout le monde appelle la tante Suzette, quoiqu’elle n’ait pas un seul neveu dans toute la commune.

Six heures et demie. Ce serait le moment de fermer la laiterie. Mais, comme d’habitude, il faut attendre le Toquet… Enfin, le voilà :

.

- Tu ne pourrais pas être une fois à l’heure ?

.

- Hm… il n’est pas tard. Le char du lait n’est pas encore là.

Le char du lait arrive, attelé d’un cheval bai. Un falot-tempête à verre jaune pend à côté du siège. Le charretier et le peseur empoignent les boilles pleines, les hissent sur le pont du véhicule, les assujettissent. Et fouette cocher ! Dans la nuit fraîche, au petit trot, mais avec un grand bruit de roues, de métal entrechoqué, de sabots ferrés, la voiture s’en va vers la gare prochaine.

Elle y trouve trois autres véhicules tous pareils, venus des villages voisins, et qui attendent la venue du train. Celui-ci arrive, s’arrête dans un grincement de tous ses essieux. Avec l’aide d’un employé, toutes les boilles sont enlevées des voitures et « envagonnées ». Bruit de ferraille, appels dans la nuit.

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- Prêt !

.

Le train repart…

Ainsi, matin et soir, dans trois cents villages vaudois, dans cinquante gares, les mêmes scènes se répètent, afin que, chaque jour, les habitants des villes reçoivent leur ration de lait frais.

Commentaire :

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[Les derniers mots du texte ne sont vraiment plus d’actualité. Plus jamais un citadin ne reçoit un lait de l’écurie à sa table. Aujourd’hui le lait passe à l’usine où est retiré la crème, il est pasteurisé, thermisé, et des tas d’étapes mystérieuses avant de finir dans du cartons plastifié et sur nos tables.]

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