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9 octobre 2018 2 09 /10 /octobre /2018 18:59

Je reprends un article du  livre célébrant la vie des Vaudois au travers du journal 24heures.

 

Quelques scandales politiques d’aujourd’hui sont à la une de vos journaux. Nous laissons faire ou nous nous scandalisons. Voici un scandale de la fin du XIXe siècle en Terre Vaudoise qui a marqué les esprits.

Radical est le scandale

Vallorbe brûle, la caisse incendie a été vidée

Justin Favrod

             Une cheminée défectueuse fait trembler le tout-puissant Parti radical vaudois. Mais commençons par le commencement. Nous sommes le 7 avril 1883, il est 8 h 45. A Vallorbe, la maison Bosshardt, à côté de l’Hôtel de la Croix-Blanche, a pris feu. Les pompiers s’activent. Ils maîtrisent l’incendie. Lorsqu’ils se retournent, ils découvrent que des bardeaux enflammés du toit ont été projetés par la bise. La Grande-Rue flambe. Puis les rues adjacentes. A 13 heures, 98 bâtiments sont détruits.

             Entre 700 et 900 Vallorbiers sur les 2000 que compte la commune ne possèdent plus que les habits qu’ils portent. Le télégraphe de la gare crépite, mais les pompiers de Pontarlier et de Lausanne n’arrivent plus que pour déblayer les ruines. Un élan de sympathie gagne le pays. Couvertures et nourriture affluent. Les villages voisins recueillent femmes et enfants. Une souscription réunit 190 000 francs.

Vallorbe le 7 avril 1883

Vallorbe le 7 avril 1883

Les caisses sont vides

             Après la solidarité, le scandale. Lorsqu’il faut rembourser les biens meubles détruits, on découvre que le gouvernement vaudois a illégalement vidé la caisse de l’Etablissement cantonal d’assurance pour boucher les trous du budget. L’Etat doit emprunter 800 000 francs.

             Or les libéraux sont justement en train de dénoncer la gestion des radicaux : le receveur des impôts de Nyon, radical, est devant la justice pour détournement de fonds. En mai, c’est le receveur d’Oron, tout aussi radical, qui disparaît avec 30 000 francs. La très libéral Gazette de Lausanne se déchaîne : « L’association démocratique (les radicaux) est au pouvoir, elle détient toutes les ressources du budget, elle dispose de toutes les influences, elle fait la loi, elle l’exécute, elle nomme tous les emplois, son personnel est partout, elle occupe tout, depuis les places de gardes champêtres jusqu’à la présidence du Grand Conseil. » Pour les libéraux, le Parti radical est responsable des scandales, comme de la situation délicate des finances cantonales.

             En novembre, la Gazette lance avec succès une pétition pour changer la Constitution. Une assemblée constituante. Ils instaurent l’impôt progressif. Le diable pour les libéraux. L’ambiance est si tendue que les constituants s’invectivent. Un jour de 1884, le radical Eugène Ruffy lance des accusations contre un parent d’Edouard Secretan, rédacteur en chef de la Gazette de Lausanne. Secretan provoque Ruffy en duel aux pistolets. La rencontre a lieu à Troinex, dans le canton de Genève. Le témoin de Ruffy a prévenu la police et l’affaire se termine pitoyablement à l’Hôtel de Ville. Tout cela à cause de la cheminée de M. Bosshardt.

Sources :

Histoire de la Gazette de Lausanne, 1874-1917, Alain Clavien, Lausanne, 1997.

Histoire des Incendies mémorables à Vallorbe, Vallorbe 1983.

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9 septembre 2018 7 09 /09 /septembre /2018 16:53

Texte de Claude Varennes, 1964, Revue Suisse de Gastronomie et de Tourisme, PLAISIRS

 

1964 – Depuis une quinzaine d’années, et notamment ces dix dernières, le whisky est devenu une boisson très populaire en Suisse. Bien entendu, j’avais déjà, étant enfant, entendu mon père dire « une fois », qu’il avait bu « un whisky »… mais que cela ne le reprendrait jamais. Ce n’était pas dans la moyenne de nos goûts.

Est-ce actuellement une mode, un snobisme ? Je ne le crois pas. Le whisky, qu’il soit scotch (surtout) canadien, « Bourbon », « Rae », etc., s’est imposé et gagne sans cesse du terrain. Il a été popularisé tout d’abord par le roman et le film. Lemmy Caution et Callaghan, Peter Cheyney aidant, ne « carburent » qu’au « Bourbon » ou au « Scotch ». On consomme aujourd’hui couramment le whisky au bar, au night-club, parfois même au restaurant ou au café. La consommation à domicile n’est pas négligeable non plus. La femme elle-même a trouvé cet alcool à son goût. Et il ne s’agit pas seulement de « Marie-Chantal », mais de nombreuses dames qui, reculant facilement devant la perspective de boire un verre de blanc, ne craignent pas de s’offrir un petit whisky, sec ou à l’eau. Comme apéritif, comme suite à un repas, à tout moment de la soirée, on offre le whisky, même parfois dans des milieux modestes et… pas toujours chez des jeunes.

[Bref, à lire ci-dessus, on boit le whisky partout, à tous les moments de la journée et dans toutes les classes sociales. Mais c’est dit de façon à ne froisser personne.]

Whisky et médecine

Un des motifs de cet engouement est – chose étonnante – d’ordre médical. Considéré comme un stimulant, le whisky a en outre la réputation de dilater les veines d’une manière particulièrement favorable à la circulation du sang. Au XVIIIe siècle, un certain Tobias Smollett écrit : « Les hommes des Highlands se régalent de whisky ; un whisky de malt… qu’ils avalent en grandes quantités sans aucun signe d’enivrement. Ils y sont habitués dès le berceau et y trouvent un excellent préventif contre le froid de l’hiver. On le donne avec succès aux enfants comme tonique en cas de petite vérole, lorsque cette éruption semble traîner… » Un autre médecin anglais écrit dans un « Discours sur le traitement de l’embolie artérielle » : « Le meilleur produit pour le soulagement de la douleur est l’alcool. Pas l’alcool pharmaceutique, mais le whisky. »

[Ben puisque les médecins le disent, buvons-en tous. D’ailleurs dans les films hollywoodiens, ils en boivent beaucoup et tous les cowboys blessés sont soigné au whisky !]

Nous pourrions multiplier de telles citations à l’infini. Retirons-en simplement la conclusion que le whisky, joignant l’utile à l’agréable, favoriserait effectivement la circulation du sang.

Consommons-en donc, avec modération toutefois, et préférons un seul verre de whisky de qualité reconnue à plusieurs de certaines innommables mixtures à bon marché présentées sous ce vocable, car Il y a whisky… et whisky !

En effet, comme dans tout, il y a la qualité… et le contraire. La qualité se paie, bien entendu, mais elle vous offre des garanties. La consommation modérée d’un whisky de qualité ne peut vous être que plaisante, alors que la consommation, même en faible quantité, d’une infâme mixture au rabais ne peut que vous nuire. Notons que la qualité-rabais peut être du vrai whisky mais trop jeune et n’ayant pas reçu les soins attentifs quasi quotidiens nécessaires à la maturation qui se produit durant cette longue période, il est plus haut en degré et peut être « réduit » à l’eau distillée pour atteindre le degré dit « de consommation », qui est en principe de 43 degrés. Si cette « réduction » se fait sur un whisky ayant déjà subi son évaporation et atteint trois ans d’âge, c’est-à-dire à peu près 60 degrés, elle constitue une manifestation normale et ne porte pas préjudice à la qualité. Si le même travail s’opère sur un jeune whisky, les résultats sont beaucoup moins favorables, car, même si son degré d’alcool lors de l’évaporation est plus élevé et semblait justifier l’introduction de davantage d’eau distillée, sa maturation insuffisante le transforme bien vite en « bibine ».

Pour cette raison, les autorités compétentes suisses ont pris des mesures interdisant l’importation de whiskies « à rallonger », de moins de trois ans d’âge et de plus de 60 degrés. La réduction faite pour le ramener ensuite au degré de consommation est alors normale et crée une boisson équilibrée.

Ce point étant dès maintenant officiellement réglé, il ne pourra plus y avoir en principe de whisky de mauvaise qualité… à moins que, comme cela a déjà été le cas, on ne le modifie avec une autre sorte d’alcool, qui ne change pas trop son goût. Mais, c’est là travail de fraudeur dont la répression sera relativement facile.

On peut conclure de ce qui précède que nous verrons peu à peu disparaître – car il reste évidemment des stocks (il y aurait actuellement en Suisse encore près de 800 000 litres de ces mixtures) – de certaines vitrines des soi-disant whiskies aux noms ronflants et au prix dérisoire, qui causent un tort considérable au vrai whisky, car, comme nous l’avons dit, à moins que le distillateur ne soit un philanthrope, un vrai whisky se paie car il vaut son prix.

[Alors, les 800 000 litres ont été bus depuis lors. Vive le commerce !]

Comment reconnaître l’authenticité d’un whisky ?

Le connaisseur peut tout d’abord facilement se rendre compte de la plénitude du goût et de la douceur agréable dus à une lente et savante maturation. En effet, les éléments éthérés qui provoquent le plaisir gustatif ne peuvent se développer que grâce au temps. D’autre part, l’absorption d’un « whisky » douteux vous laissera certainement des souvenirs fâcheux le lendemain. Voici maintenant une méthode pratique : versez une portion de whisky (sans eau) dans un verre préalablement bien lavé, rincé et essuyé. Laissez reposer durant environ dix heures, goûtez alors en vous basant sur l’habitude que vous avez du goût de votre boisson. Celui-ci a-t-il disparu ou s’est-il affaibli, alors vous êtes très probablement en présence d’un whisky de basse qualité. Le verre vidé, laissez-le sans le laver durant vingt-quatre heures. Si, après ce laps de temps, l’odeur typique du whisky ne subsiste pas dans toute sa plénitude, vous aurez, par ce double contrôle, établi définitivement le fait que votre whisky ne répond pas aux caractéristiques minimums exigibles d’un bon et vrai whisky.

Redisons doc, sans crainte de nous répéter : la qualité se paie, mais elle vaut son prix.

Consommez plutôt un seul verre de bon, du vrai whisky de prix. Il vous sera agréable et vous fera vraiment « plaisir ».

[Testez votre whisky habituel et qualifiez-le… peut-être que vous buvez de très bon whisky sans le savoir.]

En Suisse, la consommation du whisky a quintuplé en sept ans

Le bulletin des médecins suisses souligne que les importations d’eaux-de-vie ont fortement augmenté. Tandis que les importations d’eaux-de-vie ont presque triplé entre 1955 et 1962, celles de whisky ont atteint plus du quintuple. On a importé, en 1962, 2 300 000 (1955 : 1 277 000) litres de cognac, whisky, gin et autres eaux-de-vie, dont 1 034 000 litres de whisky.

La sous-commission pour la recherche scientifique de la commission fédérale contre l’alcoolisme constate que, grâce à une habile campagne de propagande, le whisky est devenu chez nous aussi une boisson à la mode. Alors qu’il était autrefois réservé aux classes sociales privilégiées, il a maintenant été adopté par d’autres classes. Les jeunes en consomment beaucoup.

[Etait-ce réjouissant… à l’époque certainement.]

Quelques anciennes publicité de cette époque avec des marques encore très actuelles.

Les Suisses boivent (aussi) du whisky !
Les Suisses boivent (aussi) du whisky !
Les Suisses boivent (aussi) du whisky !
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Les Suisses boivent (aussi) du whisky !
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17 juillet 2018 2 17 /07 /juillet /2018 16:59

Comme toujours il y a un premier, une première fois, puis des suivants ; Radio Lausanne fut la première, puis arrivèrent les autres et enfin on agglomère le tout et l’on obtient une entité commandée par Zurich, comme toujours.

De nombreuses conventions ont été nécessaires pour obtenir une Radio « nationale ».

« La diffusion des nouvelles par toutes les stations suisses indisposait l’Association suisse des éditeurs de journaux et l’Association de la presse suisse, qui craignaient de se voir supplantées. On parla de spoliation de la presse, notamment à la campagne. Les négociations entamées à ce propos aboutirent, le 23 mars 1926, lors d’une conférence présidée par M. Reinhold Furrer, directeur général des Postes, à une Convention sur la diffusion des nouvelles par TSF, qui fixait les modalités du service d’information radiophonique. En bref : deux bulletins de nouvelles par jour au maximum (l’un entre 13 et 14 heures, l’autre entre 21 et 22 heures) ; les informations à fournir par une agence ayant son siège en Suisse (en l’occurrence l’Agence télégraphique suisse) ; elles devaient être rédigées de manière à « susciter l’intérêt de l’auditeur sans le satisfaire, pour l’engager à chercher un complément dans la presse ». D’autres dispositions de la convention concernaient la neutralité politique et confessionnelle des nouvelles radiophoniques et, enfin, la prohibition de nouvelles à caractère publicitaire. Cette convention servit de base au service des nouvelles jusqu’à la fondation de la SSR en 1931. »

Radio Lausanne 1925, L’émetteur .

Radio Lausanne 1925, L’émetteur .

Pour rappel, le 21 juillet, le journal Le Matin, disparaitra sous sa forme papier pour être entièrement numérique… comment allons-nous lire notre journal du matin au bistro ?

Société Suisse de Radiodiffusion et Télévision 1931-1970 novembre 1971

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14 juillet 2018 6 14 /07 /juillet /2018 15:49

Je reprends un article du  livre célébrant la vie des Vaudois au travers du journal 24heures.

 

Un vrai caf’ conç’ antinazi

 

De retour de Paris, Jean Villard-Gilles ouvre, à Lausanne, un impertinent Coup de Soleil

250 ans dans la vie des Vaudois

 En juillet de cette année-là, notre nation se trouve dans l’œil du cyclone, soit une zone de calme au centre d’un tourbillon. La guerre rugit aux frontières, l’ennemi menace. L’ennemi est Allemand, même si des banquiers suisses troquent déjà son or maudit contre de l’aluminium, des locomotives, des armes. Et même si des activistes d’extrême droite affichent un antisémitisme braillard, en prédisant sottement le triomphe du IIIe Reich. La majorité des Helvètes se méfient de ces « Teutons, teutonnants et capables de teutonneries rimant avec c… » [Expression recueillie au Locle par l’opticien neuchâtelois Henri Jeanmaire (1914-1992), avant son exil à Londres où il créa des dispositifs de visées pour la RAF.] Un espion SS déclare : « Il n’y a que 5% de Suisses qui sont avec nous. 90% nous détestent et sont pour les Alliés. » Un éditorialiste du New York Times impute, lui, le déclin de l’hitlérisme au pays de Heidi à deux causes principales : « A un renouveau de son patriotisme comme conséquence des erreurs psychologiques de la propagande de l’Allemagne nazie. De plus, il se rend compte que le mouvement nazi peut à tout moment menacer son indépendance. »

Gilles et Julien

Gilles et Julien

Mobilisé, il chante sous nos drapeaux

 

C’est dans ce contexte d’inquiétudes mitigées de l’été 1940 que Jean Villard-Gilles a retrouvé sa terre natale. Après l’avoir quittée pour faire florès sur les plus beaux tréteaux de France, le comédien et chansonnier vaudois s’est rapatrié, il y a un an, pour être mobilisé et chanter sous nos drapeaux. Une fois par semaine, il compose une chanson pour Radio-Lausanne. S’il y récupère avec bonhomie son accent atavique qui s’était un chouia dégraissé, le voici consterné d’apprendre que Paris est occupé depuis le 15 juin.

Un jour de beau temps, il est attablé à Bellerive-Plage, au bord du Léman, égrenant des idées noires quand son oreille absolue perçoit un toucher pianistique raffiné accompagnant une voix d’or. C’est ainsi qu’il rencontre Edith Burger, la troisième femme de sa vie ; une pianiste aux belles envolées et dont le timbre clair, dira Gilles, « accroche avec une pointe d’accent canaille. Juste ce qu’il faut ». Pour  cette Jurassienne rousse aux yeux noirs qui a hérité de sa mère un tempérament provençal, ressent-il à 45 ans un « coup de foudre », comme dans les romances à l’eau de rose qu’il aime brocarder ? Non : il y a eu tant de lumière sur Ouchy ce jour-là qu’il opte pour l’expression « coup de soleil ». Il en est si fier qu’il en fait la raison sociale d’un nouveau cabaret lausannois, inauguré le 16 octobre 1940 à Lausanne, au sous-sol d’un bâtiment sis 3, rue de la Paix.

Gilles et Edith

Gilles et Edith

Saynètes caricaturant l’esprit troupier

Avec Edith, il y programme des numéros de duettistes – à l’instar de ceux qui avaient fait sa gloire dans l’Hexagone lors de tournées avec son partenaire Julien (alias Armand Maistre) de 1932 à 1939. Dans un décor enfumé évoquant les caf’ conç’ à goualantes du cher Paris d’antan, le Coup de Soleil accueillera jusqu’à la fin de la guerre un public acquis aux idées de liberté, d’espoir, de paix, sensible surtout à l’humour féroce du couple Edith-Gilles. Leur répertoire se décline en saynètes chantées, où l’on charrie l’esprit troupier, caricature Vaudois et Alémaniques (Le Männerchor de Steffisbourg). On y nargue sans ambages l’Allemagne hitlérienne, « prétendument millénaire » :

                                      Un jour ces tyrans révolus

                                      Voltigeront de leur tanière

                                      Dans un ouragan de colères,

                                      Un cyclone de coups de pied au cul,

                                      Dans la marmite de Belzébuth.

Dans la salle, quelques exilés français, dont un fameux Marcel Pagnol – il pleure aux hommages entonnés par le duo à sa patrie qu’il croit perdue. Et une certaine Edith Piaf : elle y entend pour la première fois la chanson des Trois cloches, qu’un jour elle chantera elle-même pour un triomphe mondial. Et qu’interprétera aussi Ray Charles.

Mais l’esprit frondeur qui crépite dans ce caveau lausannois n’échappe pas aux nazis. Leur ambassadeur à Berne s’en plaint en désignant Jean Villard-Gilles comme l’ « ennemi numéro un de l’Allemagne en Suisse ». Quel beau titre, quel insigne glorieux pour le futur patriarche de tous les chanteurs romands ! La France y adjoindra en 1946 une Légion d’Honneur « pour rôle actif de résistant par la chanson ».

Les trois cloches

http://www.rts.ch/archives/tv/culture/cine-actualites/9154870-les-trois-cloches.html

Le petit film présenté ici, a certainement été vu par de nombreux Romands qui à la longue, pensèrent que Gilles décrivait, dans sa chanson les Trois cloches, un quelconque village de nos Alpes, peut-être bien dans une vallée Valaisanne.

 

Lisez bien le texte dessous la vidéo.

250 ans dans la vie des Vaudois

Il fut le premier chansonnier à chanter des chansons autres que des chansons à l’eau de rose, fini pour lui l’amour toujours, la chanson réaliste et qui colle à l’actualité. Par exemple, Dollar, en 1932 est la chanson explicite des textes mis en musique par Gilles et chanté en duo avec Julien.

Il a été le chef de file de tous les suivants…

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10 mai 2018 4 10 /05 /mai /2018 16:44
Les pouces aux bretelles

Frédéric Fauquex, l’ancien et regretté président du Conseil des Etats, commandant magistral et majestueux des Cent-Suisses à la Fête des Vignerons de 1955, propriétaire-vigneron à Riex, jouait à merveille le rôle que lui suggéraient les trains spéciaux commis au retour triomphal d’un conseiller fédéral vaudois nouvellement élu, de quelques parlementaires portés aux fauteuils présidentiels des deux Chambres.

Il profitait de l’obscurité passagère du tunnel de Chexbres pour revêtir la cape rouge et blanche de l’huissier. Au moment éblouissant de la sortie, face au théâtre du Léman et du vignoble de Lavaux, il proclamait alors d’une voix d’airain, le bicorne à la main, devant l’officialité politique qui n’attendait que cet instant :

- Messieurs, je vous présente le Pays de Vaud !

Aux yeux des Suisses alémaniques, l’entier du canton s’identifiait ainsi à l’un des plus beaux paysages du monde.

- Faudrait pas qu’il exagère, le Fauquex de Riex, avais-je entendu murmurer : du beau côté du tunnel, on est encore « sur Puidoux ».

Les Vaudois révèlent l’exacte mesure de leur horizon par cette interrogation fondamentale et rituelique :

- On est sur qui ?

Ils abandonnent sans façon les latitudes et longitudes aux capitaines au long cours et accordent leur estime aux artilleurs qui font se croiser les coordonnées de la Carte nationale au 1 :25 000, à distance tactique et possible du bistrot le plus proche. Mais savoir « sur qui on est » procède de l’ouverture du compas la plus universelle qui soit, parce que tout bonnement encore inscrite dans l’entendement humain. On a même vu des pompiers rebrousser chemin : un peu plus et ils volaient le feu qui avait pris la fantaisie de dévorer le toit d’une ferme, hors les frontières communales : mille regrets, mais l’incendie n’était pas « sur eux ».

Les ressortissants de Puidoux éprouvent une joie secrète à initier les gens du dehors à la plus exacte dimension de la géographie locale :

- Attention, messieurs-dames ! Le Dézaley est tout entier sur nous comme, du reste, le lac de Bret. Le tunnel, soi-disant de Chexbres, aurait meilleure mine à s’appeler plus justement le tunnel de Puidoux.

Puidoux embrasse le Léman jusqu’aux limites lacustres de la Savoie.

Les Treytorrens, le Clos-des-Moines, celui des Abbayes, la Tour-de-Marsens, la Crochettaz, c’est encore Puidoux. Une tranche des Moulins de Rivaz et même le Signal de Chexbres sont « sur Puidoux ».

J’ai vu Marcel Dubois, conseiller national et syndic, esquisser le geste rassurant des pouces aux bretelles. Lui, le propriétaire.vigneron de Marsens-Dézaley, l’œil sulfaté au grand bleu d’avoir tant regardé le lac, ajoute encore :

- On a même un pâturage à 1000 mètres, au Mont Chesau.

Ne lui disputons pas les 17,70 mètres de la vérité topographique. Ça aurait mauvaise façon. Il suffit de savoir que les 982,30 mètres du Mont Chesau se justifient à la vaudoise : en pleine chaleur des moissons, on se sent suffisamment à la hauteur et assez au frais pour avoir l’idée de manger la fondue. N’est-ce pas la preuve des hautes altitudes ?

Les Vaudois entrevoient le bonheur dans la description d’une maison où tout y serait : jardin gras de ses choux et poireaux avec un tournesol aussi large que le gâteau aux pruneaux, le jour du Jeûne, dans le coin des fleurs et des courges ; le vin à la cave, bien entendu ; le bois de chauffage accumulé en mosaïque du côté bise ; blé et provisions au grenier.

La commune de Puidoux en rejoint l’image. Point besoin, comme à L’Abbaye, de se jumeler avec Yvorne pour inviter son vin à prendre l’air de la Vallée. Au retour, le vacherin descend à Yvorne. A Puidoux, les produits s’échangent dans les limites naturelles à l’homme, c’est-à-dire courtes.

Les séances de la municipalité illustrent la diversité de « sur Puidoux ». Un de ces Messieurs parle comme un amiral des planches à voile qui encombrent le lac de Bret, ce qui n’a pas empêché un pêcheur de capturer un brochet énorme. Si la nature avait doté le monstre d’une beau-boire, il mettait à sec d’une seule golée.

Le deuxième municipal rend hommage au temps. Les pâturages se sont bien refaits avant l’estivage et les blés presseraient même d’être rentrés.

Le vignoble prédit, une fois de plus, que l’on va « contre » le millésime du siècle. On le sait, dans leur for intérieur, les Vaudois souhaiteraient que l’événement se répète chaque année.

Marcel Dubois, le syndic, convient qu’à ses débuts parlementaires au Grand Conseil la réputation des vins de la commune précédaient d’une bonne longueur sa renommée politique. Son prédécesseur, Raymond Chaubert, quant à lui, démontrait, durant les séances trop longues, que le sommeil était aussi une opinion.

Personne n’osait lui sonner la diane, sous la forme d’un coup de coude :

- Il faut le laisser récupérer.

A deux heures du matin, le député-boulanger pétrissait le pain des gens de Puidoux.

Et le parlementaire-boulanger de se réveiller :

- Avec le blé moissonné sur la commune, s’il vous plaît !

Puidoux n’a pas éprouvé le besoin d’inventer le fédéralisme, ni de le napper d’une sauce doctrinale. C’est son fait géographique. La graine de maison a été semée claire, en petits quartiers. Ils enracinent au sol des noms comme Cremières, En Loche, En Paully, vers la Chapelle, la Vulpillière, Chauferossaz, le Nanciau. Le Flonzaley était même célèbre aux Etats-Unis, naguère, mais pas à la façon du château de Chillon ou de l’aspect pointu du Cervin. C’était l’appellation contrôlée d’un fameux quatuor animé par un Vaudois nommé Pochon. [Quatuor Flonzaley]

La fête du 1er Août illustre avantageusement le fédéralisme local, Feux et discours officiels « remuent », année après année, en sept lieux différents du territoire. Une fois la fête officielle achevée, chacun des hameaux pique son point de braise dans la toile communale. Les verres se croisent entre voisins pour la plus grande gloire de cette patrie « unie dans la diversité » : les fleurs oratoires du 1er Août prospèrent partout.

Marcel Dubois était encore municipal des eaux quand il invitait sur la terrasse de la Tour-de-Marsens un Suisse alémanique malheureux de n’avoir pas su dire, lors d’un concours télévisé, que le Dézaley se trouvait sur Puidoux et non pas du côté de Rivaz ou de Cully. On lui fit suivre du regard et de l’index les frontières légitimes et éternelles qui placent en principauté l’un des vignobles les plus pentus du globe :

- Voyez, là-bas, la petite vallée du Flon, la chute des Moulins de Rivaz ? Au levant, le Dézaley ne va pas plus loin. Ça s’apprend du reste, rien qu’en dégustant. Au couchant, c’est aussi simple : vous apercevrez les toits d’Epesses, puis les terres un peu sombres du Calamin qui font bordure.

Chez les Vaudois, les détails expliquent l’essentiel.

Marcel Dubois avait invité l’hôte venu d’une Berne lointaine à suivre du regard un chemin ondulant comme une vipère, celui de la Dame, l’un des seuls à retrouver l’horizontale sur la butte géologique du Dézaley :

- Avant la Réformation, la Cathédrale, soit la Dame de Lausanne, était tenue en grande vénération. On se regroupait sur le chemin pour la contempler de loin, faute de participer aux célébrations. Les temps ont changé. Depuis, un énorme sucre de béton oblitère l’horizon. On l’appelle le CHUV. Il a réduit les proportions pythagoriciennes de la Cathédrale. On ne débaptisera pas, pour autant, notre fameux chemin.

Marcel Dubois souhaiterait que les fromages de la commune se différencient, comme les vins, par des terroirs distinctifs :

- Nous goûterions ainsi du Chez-les-Conne, du Rueret, du Chesau et du Dalay.

On a souri aimablement à cette idée :

- Dis-nous donc, syndic, n’est-ce pas en train de repoutzer la lune ?

Si on pouvait la rendre plus brillante encore, la municipalité serait la première à dire qu’elle est aussi « sur Puidoux ».

Texte de Jean-Pierre McDonald, tiré de : « Les promenades romandes de Monsieur Pencil, dessin d’André-Paul Perret. IRL Imprimeries Réunies Lausanne S.A. 1984

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3 avril 2018 2 03 /04 /avril /2018 17:23

Pour les 250 ans du journal 24 heures, un livre retrace des épisodes de la vie des Vaudois, c’est au hasard de certains articles qui m’ont intéressés que je recopie ceux-ci pour en partager avec vous l’extraordinaire, la surprenante ou amusante information du passé.

1811

 

Le Lausannois Burckhardt redécouvre le site de Pétra

 

L’antique cité jordanienne est révélée à l’Occident par ce protestant né sur les rives du Léman.

Gilbert Salem

Depuis deux ans, soit depuis 1809, un jeune explorateur d’expression française, mais commandité par des Britanniques, prospecte les pays du Levant : ceux de la Bible, de l’Evangile et du Coran. Né à Lausanne en 1784, Johann Ludwig Burckhardt, enfant de bâlois protestants établis en terre vaudoise, a francisé son prénom. Dans la volumineuse relation épistolaire qu’il adresse à ses mandants londoniens de l’African Association, il signe Jean-Louis B. Ceux-ci la font traduire systématiquement en anglais dans des périodiques à succès et l’y prénomment John Lewis.

Leur émissaire ne s’en formalise guère, il a une fibre de polyglotte. Avant d’avoir étudié leur langue à fond, notamment à l’Université de Cambridge, il a perfectionné son allemand atavique dans celles de Leipzig et de Göttingen. Initialement, l’expédition qui lui est confiée est géographique et coloniale : Situer les sources du Niger en Afrique subsaharienne. Or il se complaît beaucoup dans les escales méditerranéennes qui la jalonnent.

Dans la ville d’Alep

 

Après un séjour à Malte, il est à présent en Syrie pour approfondir un apprentissage de l’arabe entamé à Cambridge. Dans la ville d’Alep, il étudie le droit musulman, se convertit à l’Islam, se laisse pousser la barbe, se coiffe d’un turban et se fait appeler Cheikh Ibrahim. Cette nouvelle identité lui permet de visiter sans encombre Damas, Palmyre, le Liban. Et, plus tard, même les cités de La Mecque et de Médine, alors interdites aux infidèles. Ce sera en 1814, 39 ans avant le poète ethnographe Richard Francis Burton.

C’est en été 1812 que Jean-Louis Burckhardt fait sa découverte la plus époustouflante : le site nabatéen de Pétra, fondé au IIIe siècle av. J.-C., mais tombé dans les oubliettes de l’Histoire depuis cinq cent ans. Le 23 août, il chemine au pas d’amble d’un dromadaire entre mer Morte et golfe d’Aqaba, dans la Jordanie actuelle, quand des Bédouins lui en indiquent le lieu, le « Sikh ». Ils l’appellent aussi Ouadi Moussa, soit le « ruisseau de Moïse ». Notre Lausannois alunit dans un hectare désertique bossué de roche sédimentaire aux reflets pourpres et hallucinatoires. L’entourent aussi des habitations troglodytes, des perrons royaux à colonnade latine. Un amphithéâtre où se marient splendeurs géologiques et histoire antique. Au XXe siècle, il servira de décor à un épisode drolatique de Coke en stock, l’album d’Hergé, puis au film Indiana Jones et la dernière croisade, de Steven Spielberg.

Pétra, David Robert, milieu du XIXe siècle

Pétra, David Robert, milieu du XIXe siècle

Par précaution

 

Jean-Louis Burckhardt en fait une description détaillée et émue : à l’issue d’un long couloir pierreux, il débouche sur le Khazneh, le bâtiment le plus impressionnant du site. Il doit dominer son ébahissement : « Je regrette de ne pouvoir donner un rapport complet des antiquités du Sikh. Mais je connaissais bien le caractère des populations qui m’entouraient. J’étais sans protection au milieu du désert où aucun voyageur n’avait encore passé… Les habitants s’habitueront aux enquêtes des étrangers, et alors les antiquités d’Ouadi Moussa seront reconnues comme dignes de figurer parmi les plus curieux restes de l’art antique. » Car autant il aime ces peuplades aux coutumes bariolées, autant il redoute, à juste titre, leur méfiance : un sursaut d’enthousiasme de sa part trahirait son origine européenne et chrétienne. Donc une dissimulation, crime suprême que les musulmans de ce temps-là châtient par un égorgement expéditif sous la dune ! Son témoignage n’en livre pas moins des clés essentielles aux archéologues du futur.

Sur les instances de ses bailleurs de Londres, le prétendu Cheikh Ibrahim devra quitter incessemement le Moyen-Orient pour mettre enfin le cap sur l’Afrique noire, ses dédales fluviaux et les sources du Niger, dont on saura un jour qu’elles sourdent du socle des monts Tingi, en Sierra Leone. Notre Lausannois n’en foulera jamais les berges : après trois mois de clandestinité en Arabie mahométane, il s’attarda en Egypte, y découvrant au passage la statuaire monumentale d’Abou Simbel. Il y préparera son expédition finale vers Tombouctou via le désert du Fezzan, en Libye. Elle sera annulée : Burckhardt sera emporté par une crise de dysenterie le 15 octobre 1817. A l’âge de 33 ans.

Le monastère par David Roberts

Le monastère par David Roberts

Monument d’Abou Simbel

Monument d’Abou Simbel

Plus ou moins méconnu sous nos latitudes

 

Nombreux sont les Romands qui ont visité les vestiges « incontournables » de Pétra, en ce début du XXe siècle. D’aucuns y ravivent leurs souvenirs d’un des meilleurs albums de Tintin. D’autres retiennent de cette Jordanie troglodytiques et archéologique le vertige d’avoir un peu marché sur les traces de l’acteur Harrison Ford. Or même les plus cultivés d’entre eux, au courant de la nationalité suisse de l’homme qui, en 1812, révéla le site au monde, ignorent que Johann Ludwig Burckhardt était un enfant de Lausanne. Les édiles les plus cultivés de la ville aussi : cet explorateur au destin grandiose et tragique, et dont la Bibliothèque universitaire de Cambridge conserve précieusement une correspondance en quelque 800 volumes, traduit en anglais, n’a pas droit dans sa ville natale à la moindre reconnaissance symbolique. Aucune plaque commémorative ne l’y honore.

   « D’ailleurs, Burckhardt, ça s’écrit comment ? »

Cheikh Ibrahim est Jean-Louis Burckhardt

Cheikh Ibrahim est Jean-Louis Burckhardt

Les plus.

Voilà le récit de cette aventure lausannoise prend fin ici. Vous devriez vous souvenir que j’ai déjà écrit ici, sur l’aventurier et ses découvertes sensationnelles.

On n’a pas fini d’explorer Pétra, qui révèle encore des merveilles. Un très bon documentaire de France 5, avec les techniques d’aujourd’hui, nous montre les dernières découvertes du site.

Doc France 5 - 50 minutes.

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30 mars 2018 5 30 /03 /mars /2018 15:59

Pour les 250 ans du journal 24 heures, un livre retrace des épisodes de la vie des Vaudois, c’est au hasard de certains articles qui m’ont intéressés que je recopie ceux-ci pour en partager avec vous l’extraordinaire, la surprenante ou amusante information du passé.

Vevey s’éveille à l’industrie

 

Deux précurseurs achètent les terrains des futurs Ateliers mécaniques

Vevey est, au mitan du XIXe siècle, notre petit Manchester, un berceau de la révolution industrielle, où va s’épanouir le génie mécanique suisse. Quelque dix-sept décennies plus tard, l’héritage demeure – même s’il est plus discret depuis la disparition des Ateliers de constructions mécaniques de Vevey (ACMV), dont le site s’est presque entièrement transformé en logements. Tout est dans le presque: juste à côté de la halle Inox, dernier vestige des ACMV dont le sort fait l’objet d’une bataille juridique, se tient le siège suisse d’Andritz Hydro SA, successeur, au sein d’un groupe autrichien leader mondial de la turbine, de la division hydraulique des anciennes usines veveysannes. On y prépare avec fierté la célébration, pour l’année prochaine, des 150ans de la première turbine de type Pelton, dont les dérivés successivement améliorés au fil des ans font encore la réputation de ce bijou d’ingénierie suisse.

Apprenti charpentier chez son père, il part pour l’Europe

 

Le bulletin nous apprend que tout commence par l’esprit audacieux et conquérant d’un homme. En 1842, un Veveysan de 27ans, Jean-Benjamin Roy, revient au bercail. Apprenti charpentier chez son père, il est parti à 17ans arpenter l’Europe pour parfaire sa connaissance de la mécanique. Suisse allemande, Alsace, Belgique, Angleterre, Italie, le jeune bourlingueur prend moult notes, dessine des croquis, et se pique même de poésie. A Vevey, Roy installe son atelier dans le quartier de l’Arabie, dans une ancienne fabrique de chocolat. Il y répare des machines agricoles, y fabrique des vis de pressoir et des roues de moulin – ancêtres des turbines à eau…

 

Jean-Benjamin Roy est un passionné de technique, il développe toutes sortes de nouveautés. Son atelier ne suffit plus, ni ses propres compétences. En 1844, Roy fait alliance avec un maître fondeur, Emmanuel-David Zwahlen. Les deux associés achètent un grand terrain, en bordure de Veveyse, pour y développer leurs activités. C’est là que Vevey naît à l’industrie, qui fera – avec l’avènement de Nestlé, plus tard – sa réputation dans le monde entier.

Jean-Benjamin Roy

Jean-Benjamin Roy

L'une des premières turbines construites à Vevey d'après le système Pelton

L'une des premières turbines construites à Vevey d'après le système Pelton

L’inventivité de l’ingénieur patron fait merveille

Roy et Zwahlen ne demeurent ensemble que sept ans, avant que le fondeur ne revende ses actions à l’ingénieur. La société prend le nom de B. Roy & Cie (le Jean du prénom a disparu). C’est le début d’un âge d’or: l’inventivité de l’ingénieur patron fait merveille, et très vite la modernité des machines sorties des ateliers veveysans assoit l’aura de l’entreprise. En 1863, Roy produit la première turbine hydraulique de son invention.

 

L’ingénieur se révèle être aussi un redoutable vendeur, qui ne recule devant rien pour promouvoir ses réalisations: «Conscient de la qualité des machines construites dans les Ateliers de Vevey – raconte le Bulletin de 1941 –, il entreprend de longs et pénibles voyages pour les faire connaître hors des frontières de notre pays. Il fonde des agences à Zurich, à Vienne, à Milan et à Turin et réussit à vendre, en 1867 seulement, pas moins de trente-trois moteurs hydrauliques de sa construction, parmi lesquels une turbine de 115 chevaux sous 92?m de chute constituait un véritable record.»

 

Le roi de Roumanie, le gouvernement français, le ministère italien de la Guerre figurent parmi ses illustres clients. L’expansion continue: Asie, Amérique, les turbines veveysannes prolifèrent. Comme d’autres projets grandioses, parmi lesquels de nombreux ponts et charpentes métalliques, mais aussi le canal Cavour, qui, dit la légende, aurait été inspiré au grand homme politique italien par Roy lui-même.

 

L’impétueux ingénieur est moins doué pour la comptabilité. Sa soif d’investissements assèche les finances de sa société, qu’il doit quitter en 1885. Elle est reprise par les administrateurs Philippe Blanchot et Emile Dolfuss.

 

Dix ans passent, et un nouveau patron, Ami Chessex, donne à l’entreprise son nom définitif, les ACMV – avant la déconfiture du dernier propriétaire, Werner K. Rey, près d’un siècle plus tard. Benjamin Roy, lui, est mort en 1892. Ses chères turbines sont encore et toujours conçues au bord de la Veveyse, juste derrière la gare.

250 ans dans la vie des Vaudois

Thierry Meyer

Audritz Hydro SA / repro 24 / Gérald Bosshard

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25 mars 2018 7 25 /03 /mars /2018 16:40

Pour les 250 ans du journal 24 heures, un livre retrace des épisodes de la vie des Vaudois, c’est au hasard de certains articles qui m’ont intéressés que je recopie ceux-ci pour en partager avec vous l’extraordinaire, la surprenante ou amusante information du passé.

Tissot néglige Bonaparte

 

A 17 ans, le futur maître de l’Europe adresse une lettre touchante au médecin

Par Julien Magnollay

Source : Essai sur la vie de Tissot, Charles Eynard, Ed. Dugloud, 1839.

Samuel-Auguste Tissot

Samuel-Auguste Tissot

La lettre est écrite dans un français incertain, sur un ton révérencieux. « Vous avez passé vos jours à instruire l’humanité et votre réputation a percé jusque dans les montagnes de Corse où l’on se sert peu de médecin. (…) Sans avoir l’honneur d’être connu de vous, n’ayant d’autres titres que l’estime que j’ai conçue pour vos ouvrages, j’ose vous importuner et demander vos conseils, pour un oncle qui a la goutte. »

La missive, datée du 1er avril 1787, est signée « Buonaparte, officier d’artillerie au régiment de la Fère ». Le cachet arbore les armes de la famille du futur Napoléon, surmontées d’une couronne de comte.  Agé alors de 17 ans, Bonaparte est encore un inconnu. Officier en formation, il profite d’un semestre de repos dans l’île de Beauté pour s’occuper de sa famille.

Bonaparte à l'école militaire

Bonaparte à l'école militaire

Médecin des rois

 

En 1787, Samuel-Auguste Tissot vient d’être nommé vice-président du collège de médecine de Lausanne et dirige les affaires médicales du Pays de Vaud. Le médecin, né à Grancy en 1728, a surtout déjà largement conquis l’Europe, dont il soigne les têtes couronnées depuis plus d’un quart de siècle. Cet apôtre de l’inoculation – l’ancêtre de la vaccination – s’occupe de Voltaire, entretient une correspondance médico-littéraire touffue avec Rousseau. Sa maison, dans la campagne de Montriond, est un véritable salon mondain, où se pressent les esprits éclairés du XVIIIe siècle. Marié à Charlotte Dapples, le médecin a eu un enfant, mort en bas âge.

Le roi de Pologne, l’impératrice Marie-Thérèse ou encore le roi de Hanovre lui ont offert d’être le premier médecin de leur cour. Sans succès. Tissot voyage, mais reste attaché à Lausanne. Voilà ce qu’il dit de Paris à l’une de ses amies, en 1780 : « Il y a sans doute sur huit cent mille âmes plus d’êtres intéressants que sur huit mille, mais je n’ai pu trouver ici mieux que quelques personnes que j’ai laissées à Lausanne. » Seule entorse à sa fidélité, un séjour de deux ans à Pavie, où il accepte une chaire de médecin entre 1781 et 1783. Un poste qui lui est offert grâce à l’empereur Joseph II, que Tissot avait soigné à Lausanne en 1777.

Tissot n’est pas que médecin des célébrités. Grand, mince et élégant, il s’occupe aussi des petites gens, et son dévouement lors d’une épidémie de variole lui vaut d’être nommé médecin des pauvres de Lausanne en 1752. Son livre L’avis au peuple sur sa santé (1762) est considéré comme l’un des premiers ouvrages de vulgarisation médicale. Un véritable best-seller, réédité près de cinquante fois et traduit en quinze langues. Tissot y pourfend les charlatans qui sévissent dans les campagnes, parle d’hygiène, de premiers secours. Ce succès foudroyant accompagne celui de son Onanisme (1760). Un ouvrage resté célèbre jusqu’à aujourd’hui – la masturbation rend sourd, c’est lui – et qui connaîtra soixante-sept rééditions jusqu’à la fin du XIXe siècle.

Mais revenons au jeune Bonaparte. L’adolescent demande de l’aide pour son grand-oncle Lucien, archidiacre septuagénaire de la ville d’Ajaccio. Souffrant de goutte dès l’âge de 32 ans, il est depuis plusieurs mois cloué au lit par des « douleurs cruelles » dans les genoux et dans les pieds.

Le futur maître de l’Europe termine sa requête en exprimant « la parfaite estime » que lui ont inspiré les lectures des ouvrages de Samuel-Auguste Tissot. Il faut dire que le médecin a, à cette époque, tout pour plaire à Bonaparte. Dans son ouvrage De la santé des gens de lettres (1768), il place Pascal Paoli, figure indépendantiste corse, au-dessus de César, de Mahomet ou encore de Cromwell.

La fougue et l’audace du jeune Bonaparte ne suffiront pas. Samuel-Auguste Tissot ne donne pas suite à la demande du Corse. Sur la missive, il écrit à la main : « Lettre non répondue, pas intéressante. » Le vieil archidiacre mourra trois ans plus tard. Tissot décède en 1797 de la tuberculose, dans une maison à la place de la Palud. Deux ans plus tard, Bonaparte devient le maître de la France, avant d’envahir l’Europe.

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22 mars 2018 4 22 /03 /mars /2018 19:14

Pour les 250 ans du journal 24 heures, un livre retrace des épisodes de la vie des Vaudois, c’est au hasard de certains articles qui m’ont intéressés que je recopie ceux-ci pour en partager avec vous l’extraordinaire, la surprenante ou amusante information du passé.

Beckford, le calife vaudois

 

Quand l’écrivain William Beckford s’installe avec son épouse, Lady Margaret, sur les rives du Léman, dans le château de la Tour-de-Peilz, en 1785, le prince déchu est en quête de quiétude. Sa réputation de « fils le plus riche d’Angleterre », selon les termes de Lord Byron, a du plomb dans l’aile depuis les rumeurs sur sa bisexualité. Surpris avec le jeune William Courtenay, âgé de 10 ans, dans une chambre du château de Powerdham, le sujet de Georges III voit son brillant élan stoppé net. L’exil lui paraît le choix le plus judicieux.

Passionné par l’Orient, polyglotte, (Français, Latin, Grec, Italien, Espagnole, Portugais) critique d’art, ce fils d’un maire de Londres, devenu héritier à 10 ans de l’une des plus grosses fortunes du royaume grâce à des plantations de canne à sucre en Jamaïque, ne rechigne jamais à goûter aux joies d’une vie débridée, à braver les interdits moraux, à humer le parfum du scandale.

Il se vante d’avoir rédigé Vathek, son œuvre majeure, « en trois jours et trois nuits », en 1782, dans la foulée d’une fête de Noël étirée, cloîtré avec des amis dans la maison familiale de Splendens, à Fonthill. Un huis clos qui laisse libre cours à bien des fantasmes de la part des observateurs.

William Beckford

William Beckford

Chez Voltaire

 

Après l’affaire de Powerham, William Beckford s’établit donc à La Tour-de-Peilz, sur cet arc lémanique qu’il connaît bien. « Ce pays de la fraîcheur et de la verdure, des bois de châtaigniers et des bosquets en coteau », écrit-il. En 1783, il y effectue son voyage de noces. Six ans auparavant, l’adolescent avait l’habitude de rendre visite à un certain Voltaire à Genève, ainsi qu’au Salève : « Si je ne pouvais aller rendre visite de temps en temps à Voltaire, et aux montagnes très souvent, j’en mourrais. »

Les trois petites années passées en terre vaudoise seront cruciales à plus d’un titre dans son parcours. Au bonheur de la naissance de ses filles, Margaret et Susan, succède la peine de la perte de son épouse. Dans la foulée, il apprend que le révérend Samuel Henley, à qui il a laissé un manuscrit de Vathek, écrit en français, a publié une traduction anglaise outre-Manche en dépit de son vœu de faire paraître la version française en premier. Qu’à cela tienne, William met les bouchées doubles pour concrétiser son projet avec l’aide du pasteur vaudois David Levade. Un doute subsiste quant à savoir s’il était en possession d’un autre manuscrit en français ou s’il dut traduire la version anglaise de Henley. Quoi qu’il en soit, la version dite Lausannoise du roman paraît chez l’imprimeur-éditeur Issac Hignou fin 1786 (bien que la couverture mentionne 1787).

Peu satisfait des services de traducteur de Levade, William Beckford remet aussitôt l’ouvrage sur le métier avec son ami et médecin François Verdeil. Une nouvelle édition paraît à Paris, chez Poinçot, toujours en 1787. Levade n’apprécie guère ces méthodes : « Je me suis repenti d’avoir cédé à ses sollicitations, l’ouvrage ne me paraissant ni moral ni intéressant », s’insurge-t-il dans une note retrouvée dans un exemplaire de Vathek. « Je dus menacer M. Beckford de mettre dans les papiers publics cette infidélité, qui fit qu’on arrêta à la douane de France l’envoi de l’imprimeur Hignou de 300 exemplaires qu’il envoyait à Paris. »

L’essentiel reste que William Beckford, 27 ans, s’est réapproprié l’œuvre qui lui a fait traverser les siècles et qui continue d’être vendue en librairie aujourd’hui.

Prié de quitter Lausanne

 

Il reviendra séjourner sur les bords du Léman. À Evian d’abord, en 1789. Puis, contexte révolutionnaire aidant, à Lausanne, où il est prié le jour de son arrivée de « partir immédiatement, et que si lui ou ses gens s’y trouvaient encore le lendemain matin à 7 heures, ils seraient tous arrêtés », selon un témoin de l’époque.

Outre ses pérégrinations en Espagne et au Portugal (qui inspirèrent ses Lettres from Italy with Sketches of Spain and Portugal), les hauts faits du reste de son long parcours – il meurt à 84 ans – sont davantage liés à l’impressionnant train de vie de celui que l’on surnomma « le calife de Fonthill ».

Son excentricité atteint son paroxysme dans le projet d’abbaye monumentale construite sur ses terres familiales entre 1796 à 1814 (et dont la tour s’effondra deux fois). Un sens de la démesure que n’aurait pas reniée son personnage emblématique, Vathek.

L'abbaye

L'abbaye

La tour au sol.

La tour au sol.

L'objet du scandal, le jeune comte de Devon, surnommé "Kitty"

L'objet du scandal, le jeune comte de Devon, surnommé "Kitty"

Un conte romantique noir

 

La théorie la plus répandue veut que William Beckford ait hérité sa passion pour l’Orient et ses Contes des 1001 nuits de l’un de ses précepteurs et maître de dessin, Alexandre Cozens. C’est dans cette émulation (par ailleurs à la mode à l’époque) et quelques folles soirées anglaises que William tire son Vathek, calife impétueux, excessif et cruel. Un conte romantique noir, teinté de surnaturel, inquiétant, drôle parfois. Une descente aux enfers, au sens propre, pour un personnage à l’ambition démesurée, prêt à renier les préceptes de Mahomet dans sa quête des trésors du palais de Suleïman, au fond de l’abîme, au royaume des Djinns et du roi-démon Elbis.

William Beckford ajoutera trois contes à la suite de son Vathek, le tout formant une œuvre qualifiée de majeure, dès sa sortie, par Lord Byron, puis, plus tard, par Mallarmé. Une pierre angulaire, devenue un classique, au carrefour du siècle des Lumières et de la fin du XVIIIe, aux penchants préromantiques.

Les romans gothiques.

Commentaire : Aujourd’hui, William Beckford serait reconnu comme pédophile. Pudiquement dit, dans ses biographie, bisexuel, ce qu’il n’a pas montré après le décès de sa femme, il ne s’est pas remarié et ses nuits de débauches ont toujours étés avec des jeunes garçons.

Reste qu’à l’époque et pour un bon moment encore, ça ne dérangeait pas trop la société, sauf lors d’un scandale, tel que celui du jeune William Courtenay, 9ème comte de Devon, surprit au lit avec William Beckford. Le premier avait dix ans, le second dix-huit ans.

Complément d’information : Biographie gay en anglais.

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9 mars 2018 5 09 /03 /mars /2018 17:57

Pour les 250 ans du journal 24 heures, un livre retrace des épisodes de la vie des Vaudois, c’est au hasard de certains articles qui m’ont intéressés que je recopie ceux-ci pour en partager avec vous l’extraordinaire, la surprenante ou amusante information du passé.

La vie comme à Corcelles dans la « maisonnette »

 

Mademoiselle de Saussure, devenue Polier, dit beaucoup sur la région dans sa correspondance

 

Jacques Poget

Louise-Honorée-Françoise de Saussure devenue Polier de Corcelles.

Louise-Honorée-Françoise de Saussure devenue Polier de Corcelles.

« Nous sommes tout à fait occupés de la Cour de France ; ce jeune roy, ce renversement de tout ce qui étoit il n’y a que trois semaines en règne me fait une impression que je n’ay jamais éprouvée ; les nouvelles particulières que nos François nous procurent nous rapprochent si fort de Paris, de Versailles, de Choisy qu’il me semble que c’est tout près ; et ce qui s’y passe en devient plus intéressant ; c’est comme un païsage rapproché… »

Ce n’est pas d’aujourd’hui que les Romands se passionnent pour l’actualité française. En 1774 – Louis XVI, âgé de 20 ans, succède à son grand-père -, Louise de Corcelles envoie à ses amis Charrière de Sévery, en voyage en Allemagne, des lettres où elle raconte ce qui intéresse le cercle de leurs amis lausannois.

Visites et séjours de nombreux aristocrates français, anglais, allemands, pièces de théâtre que l’on s’amuse à monter entre amis, mariages, fêtes au bord du lac y prennent le pas sur la grande politique. Et c’est sa vie à la campagne, dans le Jorat, qui tient le plus au cœur de l’épistolière.

Fille du baron de Bercher, Louise-Honorée-Françoise de Saussure épousa Jonathan Polier, fils du syndic de Lausanne. Héritier par sa mère du village joratois de Corcelles, il en prit le nom et y construisit ce que les Corçallins appellent aujourd’hui encore « le château », qu’ils ont amoureusement restauré en 1998.

A la campagne, elle respire et lit des romans anglais

La châtelaine, elle, dit « ma maisonnette » - que sont ces huit pièces en regard de la vaste demeure lausannoise où elle s’épuise ? A la campagne elle respire, lit des romans anglais, s’émerveille de son cher jardin, de la nouvelle fontaine (qui glougloute encore de nos jours) : « Cette source à laquelle Corcelles (son mari) faisait travailler depuis quelques mois, vint un beau matin se jeter à gros bouillons dans le bassin que nous lui avions préparé. C’est un grand événement à la campagne ; je crois même que les arbres des alentours s’en réjouissent aussi. Dimanche se fit le ressat* des ouvriers et des fonteniers dans notre grange, et cette fête, je vous le promets, valait à nos yeux peut-être celle du château (de Lausanne) : c’était vingt-six convives, tous de bon appétit autour d’une longue table, parodiant tout à fait celle du Baillif. »

*banquet

La santé un grand souci

Louise écrit quelquefois à son neveu, Charles de Constant, qui commerce en Chine, et presque chaque jour à ses amis Sévery, rue de Bourg, dans leur château ou à l’étranger. Car on voyage : Montpellier, l’Allemagne, cures à Plombières, en Suisse alémanique auprès d’un guérisseur. La santé est un grand souci. On consulte le célèbre docteur Tissot, qui, de Bourg à la Cité, soigne la bonne société, tout en rédigeant ses traités : « Notre amy est très peu des nôtres, on dit qu’il travaille dans son cabinet et qu’il paroîtra bientôt un livre de lui. »

Mais toujours on revient à ces petits « châteaux » qui émaillent la campagne vaudoise : les hobereaux aiment leurs villages – et surveillent les paysans qui leur doivent la dîme. Corcelles fait interdire de boire autre chose que sa production ? « Ses » paysans achètent aussitôt à Lavaux des parchets qui réjouissent encore la commune !

J’ay tant parlé patoy que je ne me tireray point d’affaire »

Dans nombre de ses lettres (un recueil publié aux Editions Spes en 1924), Louise de Corcelles évoque ce « Jurat » où elle craint « d’avoir perdu toutes mes belles manières et oublié mon beau langage. J’ay tant parlé patoy que je ne me tireray point d’affaire avec mes commères de Wurtemberg (la duchesse), de Lannion, de Tonnerre, comme je savais si bien faire icy avec mes voisins, Henry, Penseyres et Gessenay. »

Elle se plaint de la ville : « Une marquise d’un côté, un paquet de l’autre ; des allées et venues, du bruit, des obstacles, des attentes inutiles. Mais arrivée dans ma bienheureuse habitation d’icy, toute sauvage qu’elle est, je me crois au paradis. Un jour me vaut ici comme une semaine à Lausanne. » Aussi soupire-t-elle de devoir quitter Corcelles : « On voit les objets à la campagne sous un tout autre aspect qu’à la ville ; le silence qui y règne semble faire taire toutes les petites passions frivoles. Je laisse et reprends toute ma philosophie au Chalet-à-Gobet. »

Commentaire : De nos jours, impossible d’imaginer tant d’impressions dans l’esprit d’une jeune femme, puisqu’en quelques minutes de voiture on dépasse, et de loin, la campagne qu’elle se nomme Corcelles ou autre, que l’on est déjà dans une autre ville, guidé par satellites. À l’époque, du cœur de la Cité à la campagne de Corcelles, il était question d’expédition, de voyage avec un grand équipage de personnel.

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