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19 novembre 2016 6 19 /11 /novembre /2016 17:34

Ajournement ?

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Ce répit fut utilisé en conférences secrètes entre le juge Adams, l’ « agent » et les « conseils » américains, ainsi qu’en pourparlers non officiels avec les Anglais. En fait, ce que les Américains proposaient maintenant, c’était de faire juger et écarter d’emblée par le tribunal les réclamations indirectes. Des sondages opérés par Adams auprès des autres arbitres avaient aplani le terrain de ce côté-là. En somme, il fallait, selon la partie américaine, juger immédiatement ces réclamations indirectes pour les balayer du chemin de l’arbitrage. Cependant, les Anglais maintenaient leur point de vue : les réclamations indirectes n’étaient pas du ressort du tribunal ; par conséquent, ce dernier n’avait pas à en discuter, quand bien même le résultat dût être acquis par avance aux thèses anglaises. Un compromis subtil fut finalement trouvé : les juges rejetteraient de manière extra-judiciaire les réclamations indirectes ; chaque partie ferait ensuite comme si son point de vue avait prévalu. L’énoncé de cette décision extra-judiciaire posa néanmoins quelques problèmes et nécessita un va-et-vient de petits bouts de papier entre les divers représentants de parties, juges, avocats et « agents » ; le président Sclopis fut alors mis dans le secret. On arrivait à bon port. À l’ouverture de la séance officielle du 17, l’ « agent » américain déclarait donc n’avoir pas encore reçu d’ « instructions positives » de son gouvernement « touchant la demande de lord Tenterden pour un ajournement du tribunal », et obtenait une nouvelle suspension de quarante-huit heures. Les arbitres mirent la journée du 18 juin à profit pour se prononcer extrajudiciairement sur la question, selon le scénario préparé la veille dans la coulisse. Restait cependant un point technique à régler : sous quelle forme le tribunal allait-il annoncer sa « décision extrajudiciaire » ? Un verdict privé ne faisait pas l’affaire des Américains. Une décision solennelle était incompatible avec la position anglaise.

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[Commentaire : Tout cela pour ne pas perdre la face, des uns et des autres. Une autre remarque à propos des communications entre Genève et le reste du monde. Le télégraphe, s’il fonctionnait bien un peu partout dans le monde occidental, il semblerait que la Suisse était en sous-développement technique à cette époque ; certes, il y avait des télégraphes, mais pas en nombre et pas partout.]

On sort de l’impasse

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On s’en sortit de la manière suivante : le 19 juin, à la reprise des travaux officiels, lord Tenterden renouvela sa demande d’ajournement. Sur quoi, le comte Sclopis, comme président du tribunal, déclara qu’avant de se prononcer là-dessus, il voulait présenter aux deux parties intéressées l’opinion unanime à laquelle les arbitres étaient arrivés dans l’examen des réclamations indirectes avancées par les États-Unis. Sans être le moins du monde surpris, « agents » et « conseils » apprirent alors que les juges, individuellement et collectivement, étaient arrivés à la conclusion que, « d’après les principes du droit international », les réclamations indirectes américaines « ne constituaient pas une base suffisante pour fonder un jugement de compensation ou un calcul d’indemnités entre nations et que, d’après ces mêmes principes, elles devaient être exclues de la prise en considération par le tribunal dans son jugement, quand même il n’y eût pas eu de désaccord entre les deux gouvernements relativement à la compétence du tribunal ». Précaution supplémentaire, il était encore dit que, ce faisant, les arbitres n’entendaient « émettre, explicitement ou implicitement, aucun avis sur le point en controverse entre les deux gouvernements relativement à l’interprétation ou à l’effet du Traité de Washington ». Aucune contestation ne risquait de s’élever, puisque la décision avait été arrangée en secret par les intéressés eux-mêmes, et que les « agents » avaient en outre, réservé à leurs gouvernements respectifs la faculté d’interpréter unilatéralement cette déclaration dans le sens qui leur conviendrait. Les Anglais, qui entretenaient quelques doutes quant à la bonne foi de leurs adversaires depuis le dépôt, injustifié à leurs yeux, des réclamations indirectes, étaient ainsi entièrement à l’abri d’une surprise éventuelle.

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On se souvient que l’ordre du jour de la séance officielle portait sur la demande d’ajournement déposée par lord Tenterden. Le président Sclopis, ayant refermé cette parenthèse sur les réclamations indirectes, suspendit les travaux pour une semaine. Le 25 juin, à la reprise des séances, l’ « agent » américain lut une déclaration selon laquelle le Gouvernement des États-Unis considérait la question controversée comme définitivement jugée. Sur ce, nouvelle suspension de quarante-huit heures pour permettre de négocier en coulisse une formule d’acceptation britannique. Elle fut élaborée par Tenterden en collaboration avec le « conseil » et l’arbitre anglais, et fut remaniée pour tenir compte d’un certain nombre d’objections américaines. Le 27 juin enfin, Tenterden lisait la note annonçant que le retrait de sa demande d’ajournement. Il procéda aussitôt à la remise du plaidoyer britannique : on sortait enfin de l’ornière. Dans les deux pays, le soulagement fut général.

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[Commentaire : C’est ça la diplomatie.]

 

[Commentaire : N’oubliez pas que l’arbitrage de Genève un embryon de ce qu’allait devenir par la suite le Tribunal de la Haye, qui aujourd’hui est appelé : La Cour pénale internationale (CPI). Si l’arbitrage de Genève abouti, alors on peut progresser ; c’est ce qui est arrivé.]

A suivre

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