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12 avril 2008 6 12 /04 /avril /2008 14:47

Les derniers jours de Davel furent tous empreints de la même fermeté d’âme. Il savait que sa fin approchait et il n’eut aucune défaillance. Il mangeait, il dormait comme d’habitude et pourtant la mort qui l’attendait était faite pour troubler un cœur moins courageux que le sien. Il avait demandé que le moment fixé pour son exécution lui fut annoncé vingt-quatre heures à l’avance afin qu’il pût se préparer particulièrement à la mort. Ce fut le pasteur de Saussure qui vint l’avertir que l’exécution avait été fixée au lendemain après-midi, le 23 avril. Davel, comme on pouvait s’y attendre, reçut cette nouvelle sans témoigner aucune émotion, bien au contraire, ce fut d’un ton presque joyeux qu’il dit au vénérable pasteur : « C’est une bonne et heureuse nouvelle et je me soumets avec plaisir à la volonté du Seigneur. » Vers le soir, il demanda à avoir encore la visite de MM. Les pasteurs Bergier et Crinsoz qui l’avaient déjà souvent visité pendant sa captivité et qui s’étaient pris pour lui d’une sincère et profonde affection. Ces messieurs le trouvèrent joyeux de voir approcher la mort, plein de foi, d’humilité et de confiance en Dieu. La nuit venue, il s’endormit aussi paisiblement que s’il avait ignoré que ce fût la dernière.

Le lendemain matin, deux des pasteurs de la ville vinrent le voir et comme l’un d’eux lui parlait, en le plaignant, de l’ignominie du supplice qu’il allait subir, il l’interrompit : « Pourquoi me ferais-je peine d’être vu à Lausanne en posture de criminel, puisque notre seigneur a bien traversé Jérusalem pour être crucifié entre deux brigands. »

A midi, il dîna comme de coutume, puis il fut conduit devant ses juges pour entendre lecture de la sentence qui le condamnait. Il s’avança d’un pas ferme et, après avoir salué l’assemblée, s’assit sur la sellette. La sentence fut lue. Elle avait été adoucie par Leurs Excellences qui se montrèrent moins sévères que les juges de la rue de Bourg. Ils avaient fait grâce à Davel du poing coupé qui aurait été une cruauté bien inutile. Lorsque Davel eut entendu cette sentence, il prononça, au milieu d’un silence impressionnant, ces simples mots : « Je reçois avec respect cette sentence, je m’y soumets comme à un arrêt de Dieu même et je suis prêt à la subir pour la gloire de mon Créateur. »

Je suis sûr qu’à ce moment plus d’un des juges dut se sentir plein de remords à la pensée qu’il avait contribué à la condamnation de cet homme.

 

Exécution de Davel.

 

Malgré la douleur que j’en ressentais, je tins à suivre le funèbre cortège qui, l’après-midi de ce jour, accompagna Davel depuis le château jusqu’à Vidy, le lieu de son supplice. Jamais on n’avait vu et je crois que jamais on verra condamné à mort aller au supplice avec une pareille sérénité. La tête haute, le regard assuré, Davel marchait entre les ministres Bergier et Crinsoz, causant avec eux, saluant de la main au passage les personnes de sa connaissance qu’il voyait aux fenêtres ou dans la foule qui garnissait les deux côtés de la rue.

Lorsque le cortège arriva à Montbenon, Davel demanda que l’on marchât sur le gazon, plutôt que sur la route qui était fort poussiéreuse. Voyant que les soldats qui escortaient le cortège, repoussaient assez brutalement la foule, il leur reprocha cette violence, ajoutant que l’on n’était pas pressé et que l’on avait tout le temps nécessaire. On lui demanda s’il ne voulait pas faire à cheval le reste du chemin qui était encore long. Il répondit qu’il ne se sentait pas fatigué, mais que, lorsqu’il le serait, il accepterait volontiers une monture.

Lorsque le cortège arriva à Vidy, il y avait une foule énorme qui était venue assister à l’exécution, mais, chose remarquable, cette foule n’était point tumultueuse comme elle a coutume de l’être en pareilles circonstances. Tout le monde avait entendu parler de Davel, de son attitude dans la prison, de son courage et de sa piété et tous sentaient bien que ce n’était ni un vulgaire malfaiteur ni un criminel qui allait mourir.

En arrivant sur le lieu de l’exécution, le lieutenant baillival demanda encore à Davel si, en présence de la mort, il pouvait encore affirmer qu’il n’avait en aucun complice. Davel affirma une fois de plus qu’il avait agi seul. A son tour, il demanda au lieutenant qu’il lui fût permis de parler au peuple. Cela lui fut accordé à condition qu’il ne dirait rien qui pût offenser le gouvernement. Davel en donna l’assurance. D’un pas ferme il gravit les marches de l’échafaud, puis, face à la foule, il parla d’une voix étonnamment forte. Il commença ainsi : « C’est ici le plus beau jour de ma vie. Je peux vous parler à cœur ouvert, étant prêt à remettre mon âme entre les mains de mon Créateur. »

A suivre...

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